L’observatoire de Monthieux
Les volets des maisons sont encore fermés et les engins agricoles dorment, mais la gente ailée est déjà éveillée : des gazouillis, des roucoulements et des babillages retentissent dans les cimes. La rosée pare de perles scintillantes l’herbe qui recouvre le sentier vers la cabane cachée dans les roseaux. Mieux vaut être équipé de bottes pour ne pas avoir les pieds mouillés dans la fraîcheur du matin.
Je m’installe sur un banc, mes jumelles dans une main, un thermos de café chaud dans l’autre, et j’ouvre la trappe qui donne sur l’étang de Vernange.
Les oiseaux se montrent
Le miroir bleu formé par l’étang est parsemé de gemmes blancs et jaunes : des renoncules et autres plantes.
Au milieu d’eux le majestueux palais du roi des étangs : un cygne y couve ses œufs, un autre surgit des roseaux apportant dans son bec une branche à l’édifice. Pas loin, dans les joncs, attend un héron, immobile, les yeux fixés sur une proie qui reste cachée à mes yeux. Un soudain jacassement du geai des chênes l’interrompt : le grand échassier se recroqueville, se penche en avant et en un bond il s’élève dans l’air. Ses larges ailes, comme deux voiles, battent lentement et il s’en va. Je pense ô Héron, suspend ton vol, pour que je puisse t’observer encore un peu, mais il est déjà hors de ma vue.
Une danse sur l’eau
Le brouillard se lève et la fraîcheur fait place à une douce brise. Le roseau soupire dans ce Zéphyr et réveille la gente marécageuse qui commence son coassement. D’autres oiseaux apparaissent maintenant : des hirondelles font de l’acrobatie au-dessus de l’eau, dans les roseaux on peut entendre des bruants et quelques couples de canards se mettent à la recherche de nourriture. Il n’y a que les grèbes huppés qui ne semblent pas préoccupés par la nourriture : deux de ces oiseaux élégants, au bec pointu et à la huppe rousse, semblent faire de l’étang la scène de leur ballet. Ils entament une danse de couple, tantôt ils lèvent la tête, tantôt ils l’allongent au ras de l’eau, puis ils plongent et ressurgissent avec des plantes dans le bec.
« C’est leur parade nuptiale : les grèbes font une sorte de danse de séduction synchronisée lors de laquelle ils se présentent des plantes comme cadeau. Ils les utilisent ensuite pour fabriquer leur nid flottant. Ce sont des oiseaux originaux. Dans quelques semaines, quand les oisillons sortiront de l’œuf, la mère les portera sur son dos jusqu’à ce qu’ils arrivent à nager seul. Pendant ce temps, le père les nourrit directement sur le dos de la mère »